Cela faisait à présent deux jours que Breiv et tous les autres candidats se trouvaient sur ce fichu bateau et la sirène trépignait. Elle ressentait comme cette espèce de sensation qui lui hurle au creux de l’oreille : « qu’est-ce que tu fous avec tes jambes Darling, alors que tu as l’océan juste sous toi, saute, saute » mais pourtant, la jeune candidate s’était retenue, s’étant fait la promesse de ne pas craquer trop tôt pour ne pas trop afficher sa race aux yeux de tous. Elle comptait être intégrée et il était évident qu’elle ne le serait pas si jamais elle passait son temps loin de tous au milieu des remous de l’eau. Pourtant, ce soir-là, alors qu’elle se trouvait au bord du pont, inhalant les odeurs d’embruns, elle comprit que la nature était trop forte et qu’elle ne pourrait pas résister plus longtemps. Il était tard, certaines personnes dormaient, d’autres discutaient à l’intérieur, loin du vent marin, le pont était à elle et il était plus que temps de céder à ses envies. Prenant ses précautions, elle regarda une bonne vingtaine de fois autour d’elle pour être sûre que personne ne viendrait et elle commença à se déshabiller. Elle n’aimait guère son corps d’humaine et avait hâte de retrouver sa queue et ses écailles de sirène. Soudain, elle entendit des bruits de pas dans son dos. Elle était entièrement nue. Panique à bord. Elle devenait rouge comme une tomate. Un bref coup d’œil lui fit comprendre qu’il s’agissait de Milo, le triton, qui ne se gênait pas pour se rincer l’œil. Merde, merde, merde. Pas le coup de l’entre-jambe, j’vous en supplie. Elle poussa un cri de gêne. « Re-re-re-re-retouuuuuuuurne toiiiiii. » Elle chercha un moyen de se cacher puis, en dernier recours, elle se hissa sur le rebord et sauta dans l’eau. Immédiatement, elle sentit que ses jambes se resserraient pour reprendre une forme de queue de sirène. C’était une sensation magnifique. L’eau était douce et elle se frottait à elle avec délice. Elle retrouvait sa condition de sirène et… BORDEL DE MERDE QUE CA FAISAIT DU BIEN. « Youhouuuuuu » hurla-t-elle, oubliant déjà l’incident précédent et piquant une tête dans l’eau avant de remonter à la surface.

La vie en communauté n’est pas toujours facile j’vous assure, je déborde habituellement de joie de vivre mais là, être mélangé avec d’autres races et des personnes antipathiques qui plus est, ça m’donne envie de repartir loin très loin dans mon petit récif, retrouver ma petite vie tranquille avec Willy mon meilleur ami hippocampe et Janette, sa cousine crevette. J’vous assure j’ai vraiment beaucoup de mal à me faire à la vie humaine, ces jambes berk, je ne vais jamais réussir à m’y habituer. Je n’ai qu’une seule envie, plonger, retrouver ma nageoire, mes écailles et aller manger de l’algue bien fraiche. J’suis dans mon lit, à deux doigts du sommeil profond, au dessus Johnny commence à ronfler en toute impunité, tellement fort que j’ai l’impression que les murs sont en train de vibrer. « Que quelqu’un m’explique pourquoi il fait toujours ce bruit incessant dans son sommeil… »  Avant de l’étouffer avec un coussin je sors de la cabine pour aller prendre l’air sur le pont. Je me promène sur le bateau en boxer. J’dois vous avouer une chose, mois je suis habillé, mieux c’est. Nous les tritons, nous ne nous couvrons pas pour vivre sous l’océan, avoir 36 couches de tissu sur moi est un automatisme que je n’ai pas encore pris il faut croire. La température extérieure est parfaite, une petite brise fraiche me caresse le visage et me décoiffe accessoirement. (Ouais parce que maintenant que j’ai découvert le gel et la laque je peux vous dire, c’est la fête à la maison) Là je tombe nez à nez avec la belle sirène qui était venue me parler lors du prime. Breiv, c’est son nom, si mes souvenirs sont exacts. Elle est toute nue, je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour me contrôler et refréner le désir en moi qui tente de faire gonfler mon entre-jambe. Je laisse échapper un  « Woooooow » Elle est gênée, moi aussi.  Je me retourne instantanément mais j’entends un énooorme PLOUF. « ATTENTION UN HOMME A LA MER… » Alors je me précipite vers la rambarde et passe ma tête par-dessus pour voir ce qui lui est arrivé. Elle se tient à la surface de l’eau, plus heureuse que jamais, la lumière de la lune brille sur ses écailles. Je m’étais promis de ne pas le faire jusqu’à ce que j’arrive à contrôler parfaitement mon corps d’humain mais je ne peux plus m’en empêcher… Je saute aussi par-dessus bord, mes jambes n’ont pas le temps de pénétrer l’océan que je retrouve immédiatement mon corps de triton.  « DIEU QUE C’EST BON… J’vais pouvoir aller chercher des algues maintenant »

Breiv était aux anges, carrément aux anges. Ces petits anges de la mer qui lui rappelaient que c’était ici qu’elle se sentait bien, que c’était bien au creux des remous qu’elle se sentait chez elle. Elle en avait presque oublié la présence de Milo, triton lui aussi, qui pourtant venait de la voir entièrement nue une minute plus tôt – avant qu’elle ne se jette à l’eau. Elle l’avait oublié jusqu’à ce qu’elle entende un grand PLOUF à ses côtés. Oup, une vague en pleine figure, eau salée, délice. Milo avait sauté à son tour, prenant sa forme de triton. Breiv rougit en pensant qu’elle le trouvait réellement mignon ainsi. Elle détourna le regard pour plonger sous l’eau. Puis, quand elle eut réussi à calmer sa gêne elle remonta à la surface et dit à Milo : « Tu… peux effacer de ton cerveau ce qu’il vient de se passer il y a cinq minutes ? » il était fort dommage que cela ne soit pas réellement possible. Elle n’aimait guère savoir que Monsieur j’ai l’entre-jambe qui gonfle ait son corps entièrement nu en tête à tout moment de la journée – et de la nuit. Elle lui sortit un pauvre sourire du genre ‘bordel que j’suis gênée’. « Bon, heu… » Il fallait avouer qu’elle ne savait pas trop quoi dire à présent. La situation était quelque peu gênante pour elle. « Tu… Arrives à t’y faire à ces jambes ? » Elle préférait taper dans quelque chose d’assez banal, ne serait-ce que pour orienter la conversation sur autre chose.

J'vous assure, ça fait un bien de fou de pouvoir retrouver son habitat naturel. J'me sens revivre, là, dans l'eau, je n'ai plus à me soucier de la manière dont je dois positionner mes jambes pour avancer convenablement sans avoir peur de tomber comme une grosse loque sur le sol. Je bouge ma nageoire dans tous les sens pour exprimer le bonheur que je vis actuellement de pouvoir être un triton à nouveau. La lumière de la lune se reflète sur mes écailles qui brillent comme elles n'ont jamais briller auparavant. Je plonge ma tête sous l'eau pour entendre à nouveau le bruit des fonds marins, un petit poisson rouge passe devant moi. « HELLO L'AMI, T'ES EN BONNE COMPAGNIE DIS MOI, VAS-Y, TU PEUX T'LA FAIRE, GO GO GO » Oh mon dieu. Je le chasse comme je peux et retourne à la surface pour trouver une Breiv toujours aussi gênée.   « T'inquiètes pas, c'est déjà oublié, considère moi amnésique, j'ai rayé ce moment de ma mémoire. D'ailleurs, qui es-tu ?  » Je lui tends ma main histoire de la saluer. « Moi c'est Milo, enchanté. J'suis un jeune triton venant d'un très lointain récif paumé en plein milieu d'un océan dont j'ai n'arrive jamais à retenir le nom. Oh mon dieu c'est grave, c'est comme si j'étais un humain qui n'arrivait pas se souvenir de son adresse.  » Je panique un instant avant de me prendre une petite vague dans la gueule. « Les jambes c'est la mort, je préfère encore me traîner sur le sol avec ma nageoire plutôt que de devoir marcher sur deux pieds à nouveau. Berk. Attends, deux secondes » Je replonge un instant et nage dans les profondeurs, croisant deux ou trois thons sur mon passage (non je ne parle ni de Lisa, ni de Saana, ni de Jea), une fois avoir trouvé ce que je cherchais, je retourne auprès de la sirène.  « Regarde, je t'ai ramené un magnifique coquillage !!! Bon il est abîmé sur le côté mais... On fera avec.  » J'fais de mon mieux pour la mettre à l'aise, elle est quand même pire que timide.

La seconde rencontre entre Milo et Breiv avait assez mal commencée par une phase nudiste mais déjà, elle prenait une tournure un peu plus sympathique, ou du moins bien moins gênante. En effet, Milo assurait qu’il était prêt à jouer l’amnésique pour qu’elle ne se sente pas mal en pensant au souvenir qu’il pouvait avoir d’elle nue, sur le pont du bateau. Breiv lui en était réellement reconnaissante et lui offrit donc son plus beau sourire en guise de remerciement. Ils repartaient alors sur de meilleures bases et il se présentait à nouveau. Elle laissa échapper un petit rire quand il parla du fait qu’il n’arrivait même pas à se souvenir de son adresse. « Ce n’est pas exactement comme un humain, disons cela. Moi c’est Breiv, enchantée. Je viens d’un petit récif de corail absolument adorable sur la côte Est où j’ai également passé une grande partie de ma vie. Je ne suis dans le milieu terrestre que depuis quelques semaines, du coup j’ai autant… heu, oui, peut-être un peu moins… » sourire « j’ai du mal également avec ces foutues jambes » il fallait dire que ce n’était guère pratique, elle préférait de loin sa queue de sirène et son milieu aquatique. Pourtant, ce n’était pas au point d’avoir l’envie de se traîner sur le sol comme une serpillère. Milo semblait être tout le temps à cent à l’heure comme s’il ne pouvait pas se poser un instant et, déjà, il se trouvait sous l’eau. Breiv plongea à son tour pour voir par où il partait puis remonta à la surface avant lui. Il lui offrait un coquillage. « Ooooooh, c’est ado-ra-bleuh » Elle redevenait la petite fille émerveillée devant un tel présent. Elle tenta de le coincer au milieu de ses cheveux mais cela ne tint pas. « Je me ferais une attache une fois sur le bateau. J’aurais l’impression d’avoir de nouveau dix ans. » Ses pupilles brillaient carrément. « Bien, on va pas rester à la surface quand même. Viens, on va nager, on sera mieux sous l’eau. » et sur ce, elle plongea.

J'crois qu'elle apprécie le coquillage que je suis allé lui chercher, j'ai l'impression de la voir rougir. Elle est quand même mignonne la Breiv, on ne va pas se le cacher. J'ai bien envie de déposer un léger baiser sur sa joue mais elle risque de s'offusquer, elle a l'air un peu traumatisée du contact humain. « Je cherchais une perle à la base mais je n'ai pas trouvé d’huîtres dans le coin désolé...  » Elle me propose d'aller explorer les fonds marins et sans attendre, plonge la tête la première. Je la suis dans sa descente vers les profondeurs, tourne un peu autour d'elle, ondule mon corps de triton de manière sensuelle et caresse de temps à autre sa nageoire avec la mienne en feignant de ne pas le faire exprès. Il fait de plus en plus sombre j'ai l'impression, normal, il est tard et la lumière de la lune ne suffit pas à éclairer les eaux troubles de l’océan. Le petit poisson rouge repasse devant moi. «  VAS-Y MON FRERE, ELLE EST BONNE, FAUT QUE TU T'LANCES, ELLE NE DEMANDE QUE CA ». Je le chasse une nouvelle fois regarde Breiv en souriant bêtement. Elle n'a rien compris, tout va bien. Après dix minutes de nage on arrive dans ce me semble être une petite grotte, je ne sais même plus ou mettre ma nageoire, on manque cruellement de luminosité, alors machinalement j'attrape la main de Breiv et passe mes doigts entre les siens. Premièrement pour la rassurer parce que je suis certain qu'elle a un peur, deuxièmement parce que moi aussi, j'suis un peu angoissé, imaginez un calamar géant surgit de nulle part. Ce serait une catastrophe. Ils ne sont pas très sympathiques. Je tente de dédramatiser la situation. « Au moins on peut trouver le calme par ici. » J'lance avec un sourire. « Bon, on visite ? Avec un peu de chance on va tomber sur un trésor caché ou un truc du genre. » Je réfléchis un instant.« J'te préviens on partage pas avec les autres humains !  »

Une perle. Ohhh. Trop de choupinitude dans ce garçon. Breiv souriait bêtement. Elle se sentait enfin apaisée après deux jours de stress dans ce bateau. L’eau. Milo. Ces petits cadeaux attendrissants. Et encore l’eau. Et hop, ils plongeaient. La sirène sentait l’eau salée épouser ses formes, se balader tout contre sa queue qui s’agitait au rythme de ses battements destinés à avancer. L’extase. Etait-ce cela qu’on appelait l’orgasme ? Breiv se le demanda un instant avant de rougir un peu plus. Elle effaça cette question de sa tête et tourna son regard vers Milo. Il avait une expression un peu gênée. Oh mince, s’était-elle exprimée à haute voix ? Cela ne lui avait pas semblé. Elle détourna le regard. Une ou deux minutes plus tard, elle sentit les doigts de Milo se poser contre les siens. Elle se sentit frissonner. Et rougir un peu plus. Etait-ce volontaire ? Elle en doutait. Elle se surprit à penser que ce serait bien dommage si cela n’avait été qu’un accident. Que lui prenait-il ? Tout cela était ridicule. Ils arrivaient devant une grotte. Bien sûr il faisait sombre à l’intérieur et Breiv comprit que Milo ressentait de l’appréhension lorsqu’il attrapa sa main et la serra fort dans la sienne. Elle lui sourit. Elle-même n’était guère apeurée. Elle avait passé son enfance à jouer dans des grottes similaires à celle-ci, ainsi cela faisait un peu partie de son quotidien – voir de ses meilleurs souvenirs. « Oui, du calme, voilà qui serait parfait. Je ne pense pas que nous aurons souvent l’occasion de connaître ce mot dans les semaines qui suivront, profitons-en » Et voilà que Milo lui proposait une sorte de chasse au trésor ! Le regard de Breiv s’illumina. Comme dans son enfance. Ce triton-là était un chouette type qui avait gardé un cœur de gamin. Elle ne pouvait s’empêcher de l’apprécier pour cela. Elle lui rendit son sourire, empoigna sa main et cria : « C’est parti ! » Ils avancèrent de quelques mètres. « C’est super sombre, on va avoir du mal à voir quelque chose là-dedans. Si quelque chose il y a… » Soudain, comme pour répondre à ses dires un poisson abyssal, et ainsi lumineux, passa par-là. « Hé ! Monsieur ! ne partez pas !» « MADAME » s’écria la chauliode, offusquée, avant de s’en aller bien vite les laissant dans le noir. « Charmante » dit Breiv vers Milo tout en laissant échapper un petit rire.