Lassé de voir toute cette foule de candidats entassés les uns sur les autres - et surtout vachement vexé de m'être pris un sacré vent en pleine gueule - je prends l'initiative de m'éloigner des autres candidats et de partir à la découverte des alentours. Le moins que l'on puisse dire déjà c'est que la propriété du château est vraiment des plus immenses, ça m'a même l'air interminable vu d'ici... j'approfondis encore un peu mon expédition, quitte à me perdre, au moins ça attirera un peu l'attention sur moi. Je finis par tomber sur un gigantesque lac au détour d'un arbre - le plus difforme ever au passage - et je décide de m'adosser à celui-ci pour contempler ce dit lac alors que des lucioles semblent faire leurs apparitions, putain c'est beau quoi.

« Bouge toi mec, tu fais pitié à rester planter comme une oie, et tu sais ce que j'pense des oies. » Quelques candidats se mettent à quitter l'endroit où nous nous trouvons. Je ne sais pas vraiment où on est à vrai dire. « Là ! Sur la droite, y'a un mec égaré ! Il est à mon goût, j'suis sûr que j'peux le pécho, vas-y va lui parler que j'fasse ma belle. » Soupir. Dois-je vraiment m'aventurer plus loin ? Ou dois-je attendre encore un peu et suivre le mouvement. Quoi que... Les candidats semblent se disperser, et bientôt, je serais seul, là, les mains dans le vent, puisque mes poches sont aux abonnées absentes. « Alleeez ! J'vais pas te le pardonner si je loupe mon coup ! » Sur ce, et simplement pour lui faire plaisir, je décide de m'aventurer un peu plus loin, me mettant alors à suivre le fameux candidat comme si ma vie en dépendait. Peut-être était-ce le cas. Peut-être que si je n'avais pas bougé, la Vieille Fée m'aurait foudroyé. Ou peut-être pas. Nous ne le saurons jamais. Là dessus, je continue de l'observer, de loin. Il semble s'arrêter près d'un lac. « Vas y ! Pousse le ! Il est moche en fait ! On dirait un canard, putain c'est moche un canard ! Il a même pas de plume verte, AH ! Quel ringard. » qu'elle continue de gémir. Il va nous repérer. Je vois d'ailleurs son visage se retourner et m'empresse de prendre la parole « Je hum... Je me suis senti de te suivre. » et j'ai clairement déjà fait mieux comme approche « Et si tu te poses la question, non, je ne suis pas un pervers, je suis juste un peu dérangé. » pas sûr que ça plaide ma cause, cependant. « T'es carrément dérangé tu veux dire ! J't'ai vu bouffer de la tomate l'autre jour, et c'est dégueulasse la tomate ! » hm...

Les lucioles virevoltent les unes en accord avec les autres au-dessus du lac où l'on peut distinguer les reflets de leurs lumières scintillantes. Un doux sourire naît aux coins de mon visage alors que je contemple ce spectacle magnifique pour la première fois, je connaissais l'existence des lucioles, mais je n'en avais jamais vu de mes propres yeux et le moins que l'on puisse dire, c'est que ça n'a rien de décevant. Je me perds quelque peu dans pensées et contemplation, mais des éclats de voix attirent bien vite mon attention, je me redresse brusquement et tourne la tête pour découvrir la source de ce bruit: un autre candidat. « Ouf c'est toi ! Tu m'as fait peur, pendant un instant j'ai cru que la vieille avait lâché un monstre à ma poursuite pour me punir d'avoir déserté l'attroupement près du plateau » dis-je calmement puis il sort à son tour une déclaration qui n'a pour effet que de me déclencher un rire silencieux et ajoutons à cela son étrange volatile qui n'a pas l'air d'avoir la langue dans sa poche - attendez, ça a une langue une colombe ? - bref, je décide de me lever et d'aller à sa rencontre « C'est pas grave, je suis ravi d'avoir un peu de compagnie aussi dérangée soit-elle » déclarai-je avec un sourire timide, puis je lui tendis ma main « Au passage, moi c'est Calliste ! »

J'n'ai jamais vraiment su si le temps pouvait se mettre à l'orage en une fraction de seconde. Oui, en combien de temps la pluie en elle même parvenait-elle sur terre. Naissait-elle en grandes quantités, se dispersant un peu partout dans la nature jusqu'à s'écraser contre la terre. Pourquoi une telle goute, avec la vitesse à laquelle elle tombait, n'était-elle pas plus lourde ? Je regardais colombe qui tout à coup, avait décidé de se taire. Elle était pensive, tout comme moi. « Ouf c'est toi ! Tu m'as fait peur, pendant un instant j'ai cru que la vieille avait lâché un monstre à ma poursuite pour me punir d'avoir déserté l'attroupement près du plateau » un fin sourire muet s'esquisse alors sur mon visage « J'ai pris tant de poids que ça ? » « Evidemment que t'en as pris, vu l'maigrichon que t'étais y'a quelques mois ! Heureusement que j't'ai mis à l'exercice hein. » Oui, il est vrai que mes muscles avaient ces derniers mois pris du volume, histoire de me préparer à cet instant. A ce jeu. Mais également pour me faire un minimum plaisir, après tout, on se sentait bien mieux dans son corps lorsque l'on se savait un minimum désirable. « C'est pas grave, je suis ravi d'avoir un peu de compagnie aussi dérangée soit-elle. Au passage, moi c'est Calliste ! » il me tendit une main que je dévisageais quelques trois secondes, ne sachant trop quoi faire. Certes j'avais vécu un moment dans le monde humain, mais cela faisait également un moment que j'en avais perdu les coutumes principales. Ainsi, sur un jeu de devinettes silencieuses, j'avançais ma main vers la sienne, alors que seul nos deux majeurs se touchaient, avant que je ne le retire, comme si une connexion avait bien eu lieu entre nous. Finalement je lui souris, presque fier de moi. « T'es vraiment un imbécile hein. Bon moi j'me casse, j'te laisse le laideron, j'suis sûr que t'es à son gout. » et sur ce, le volatile ne tarda pas à décoller de mon épaule pour disparaitre. Bruissement de feuilles. « Désolé pour ça... Et rassure toi, tu es loin d'être laid. »

Je ne peux m'empêcher de lâcher un léger rire à l'entente des paroles du volatile, rire que je m'empresse aussitôt de dissimuler derrière ma main: ça peut paraître complètement stupide, mais je n'ai jamais pu supporter la tête que j'ai lorsque je ris. Bon, théoriquement je ne peux pas me voir à l'instant présent, mais lui peut me voir et je ne suis pas sûr que ce soit beau à voir. En parlant de lui, il ne m'a toujours pas dit son prénom puis je vois qu'il a l'air d'hésiter à me serrer la main et on ne peut pas dire que l'idée de me prendre un vent de plus me soit des plus agréables... Il se décide finalement à agir, je soupire rassuré, mais à peine nos majeurs effleurés il la retire aussitôt à ma grande incompréhension. Je hausse un sourcil, comme pour lui demander une quelconque explication, mais il sourit simplement - et quel sourire, je manque de m'évanouir - chose qui n'a pour effet que de faire également naître un sourire sur mon visage. Tout à coup sa colombe décide de s'en aller, non sans avoir pestiféré une fois de plus, mais bizarrement je l'aime bien moi cette bestiole et c'est bien mon genre après-tout de toujours chercher à voir le positif, parfois même où il n'y en a pas - un jour ça me perdra - « Désolé pour ça... Et rassure toi, tu es loin d'être laid. » je rougis sous le compliment, j'ai pourtant l'habitude d'en recevoir, mais aucun ne m'a jamais paru plus sincère que celui-ci « Hum merci... je ne peux que te retourner le compliment. » puis je décide finalement de m'asseoir dans l'herbe en l'invitant à en faire de même et je poursuis « Que penses-tu de ce début d'aventure ? Pas trop déçu jusqu'à présent ? »

Il me semblait logique de tenter de rattraper les paroles de cette foutue bestiole. Elle avait un don particulier pour dire tout ce qu'elle pensait, et clairement, ses goûts étaient loin d'être ceux des humains, de ce fait quelque chose de naturellement beau pouvait paraitre totalement laid à ces yeux, comme le jeune homme face à moi. De toute façon, ils n'avaient dans l'ensemble que trop bien choisi leur casting, puisque de toute évidence, je n'avais pas vu beaucoup de personnes que l'on pouvait qualifier de "laid". Et puis de toute façon, je n'avais jamais vraiment prêté d'importance à une enveloppe charnelle, quelle qu'elle soit. J'observe ses joues rougir au contact d'un compliment sur a peau, j'arrive même à ressentir cette chaleur qui doit à ce moment précis envahir son corps. C'est toujours ainsi que l'on rougit. « Hum merci... je ne peux que te retourner le compliment. » je lui adresse un simple geste de tête en signe de remerciement. Finalement le jeune homme prend place dans l'herbe alors que je me rends compte que je ne me suis pas présenté. Hm. Des coutumes qui ne m'étaient plus trop familières. Je m'étais bati un monde dans lequel je n'avais plus besoin de présentation. Où tout le monde se connaissait. Un monde à moi. « Que penses-tu de ce début d'aventure ? Pas trop déçu jusqu'à présent ? » Je prends ainsi place à ses côtés, ne tardant pas à lui répondre « Disons que j'attends de voir comment le tout va se dérouler. Je dois t'avouer que je ne suis certainement pas le plus sociable d'entre nous tous. » mes lèvres esquissent un léger sourire, mes yeux vaquant de l'herbe à ceux du jeune homme « Je suis Bo. » court silence « C'est mon prénom... Bo. » qu'il ne croit pas que je m'auto complimente en français, ce n'est pas vraiment mon genre. « Et toi, que penses-tu de tout ça ? »