Franchement, faire des dortoirs dans le sous-sol à côté des oubliettes, c’est un peu tordu non ? A croire que j’ai sous-estimé le sadisme de la vieille peau. J’espère juste qu’elle ne va pas décider de me compter parmi les huit pauvres âmes pour pieuter là-dedans, parce que je préfère encore la tente à une pièce sans lumière naturelle. A tous les coups elle a épinglé des marionnettes au mur, rien que pour moi. Un frisson me parcourt l’échine rien qu’à cette pensée, mais pour l’heure je serais prêt à faire un strip-tease devant les caméras pour qu’on me laisse entrer dans cette fichue pièce. Parce que ça fait quatre nuits que je veille, angoissée à l’idée de me faire violer par le travelo –non je plaisante, ça va- et surtout incapable de supporter les ronflements de l’une des bêtes de l’aventure –parce qu’un humain lambda ne peut décemment pas faire ce bruit-. Et d’avoir des cernes ça m’emmerde, parce que ça ruine mon image. Je jette d’ailleurs un regard dans l’angle du couloir, là où mon ouïe particulièrement fine a perçu le déclic d’un objet en mouvance. Sans nul doute l’œil des pervers qui nous matent à travers leurs écrans, parce que ouais, c’est obligé que quelqu’un bave sur moi quelque part dans son siège en remerciant le ciel d’avoir accepté ce boulot de voyeur à priori sans grand intérêt. « Eh, au lieu de fantasmer sur ma belle gueule, tu pourrais peut-être me donner un coup de main, non ? » Oui je suis conscient de m'adresser à un objet inanimé, mais sait-on jamais. Je pourrais aussi lui proposer un paquet de fric, je sais par expérience que ça marche dans deux cas sur trois. D’un autre côté je doute que des types soient assis toute la sainte journée pour épier le moindre de nos mouvements, et en fait, je n’ai pas vraiment envie de savoir. Evidemment rien ne se passe et je grogne en fixant la porte avec intensité, comme si j’allais parvenir à l’ouvrir avec la force de mon esprit. Y’a pas un candidat qui maîtrise l’électricité dans le coin ? Et puis ça me traverse comme une envie de pisser, l'idée que cette vieille bique nous mène peut-être en bateau depuis le début avec sa soi-disant porte électrifiée. J'imagine qu'aucun candidat ne s'est jetée dessus pour vérifier la théorie, aussi je pénètre dans la salle la plus proche -celle de l'entraînement- pour y dénicher un quelconque objet qui pourra servir à mettre en oeuvre mon plan -que je trouve pour le coup particulièrement intelligent, mais ça ne m'étonne pas de moi-. J'attrape rapidement un truc en plastique non identifiable -qui ressemble à une matraque mais qui pourrait aussi bien être employé pour d'autres dessins, si vous voyez c'que je veux dire- avant de revenir dans le couloir pour le lancer sur la porte des dortoirs. Et malheureusement, je constate en sourcillant que la vieille peau disait vrai : le pauvre morceau de plastique retombe lamentablement sur le sol après avoir essuyé une décharge qui avait l'air assez puissante pour me dissuader de renter l'expérience avec mon doigt. Flûte. Je m'accroupis pour récupérer l'objet et reprend ma position initiale face à la porte, les bras croisés et l'arme bizarre entre mes doigts. Il doit forcément y avoir un truc pour débloquer ce champ électrique. « Shazam, ouvre-toi. » Sur un malentendu … Toujours rien, ça me fait suer.

C'est quand même drôle de pouvoir voir le chateau, le visiter, le toucher du doigt et d'être obligé de dormir dehors dans des tentes où on est tous collés les uns aux autres et où on s'entend ronfler et où on sent le moindre pet pendant des jours. Ah tant de promiscuité, ça ne dérange pourtant pas vraiment Tyger, après tout quand on a grandi dans un orphelinat avec des gamins qui pleurent toutes les nuits, qui font pipi au lit ou se réveille à cause d'un cauchemar, on pourrait dormir n'importe où. Tyger se réveille donc tranquillement le matin, avec un grand sourire et en sifflotant, histoire d'énerver encore plus tout le monde. Il a l'air gentil comme ça mais il a un peu une passion dans la vie, c'est d'emmerder les gens. il va squatter la cuisine puis en voulant retourner vers le parc, il se perd un peu dans le chateau. Eh merde, le voila qui se retrouve dans un sous-sol ou quelque chose, faudrait qu'il regarde où il va la prochaine fois. Bon en tout cas, ça lui permet d'être un peu tranquille et d'éviter les sosies de Nabila qui se plaignent encore de l'absence de shampooing, de douche, de soin pour le visage et de recourbe-cil. Y a des jours il aimerait bien avoir le pouvoir de vraiment se transformer en tigre. Enfin un peu de tranquilité dans ce sous-sol, alors il se sent enfin libre de se laisser aller à quelques pas de danses, il sort son Ipod et se le met dans les oreilles. Il commence à faire un tour sur lui-même sur les Jackson 5 mais s'arrête net quand il entend un bruit bizarre, genre surcharge électrique. Oups, merde, tout va exploser ? Ou alors quelqu'un est en train de saboter un truc ? La curiosité l'emporte sur l'envie de détaler - aller t'es pas un froussard Tyger quand même - alors il s'avance jusqu'au bout du couloir pour voir un des mecs qui se tient devant une porte fermée qu'il essaie d'ouvrir en trouvant le bon mot de passe. “ Qu'est-ce que tu fous ? ” lance-t'il, l'air perplexe. Il commence à se demander si le mec devant lui est un fou ou un con ou les deux. “ T'essaies d'ouvrir la caverne d'Ali Baba comme ça ? ”

C’est vrai, tout individu s’adressant à une caméra ou se parlant seul passe naturellement pour un con. Sauf que pour moi ça ne s’applique pas, parce que je suis Sullivan et que je ne peux décemment pas avoir l’air d’un con. Pourtant c’est bien ce que je lis dans le regard de l’autre tatoué ‘Mother I love you’ lorsqu’il m’interroge sur la raison de ma présence ici. Euh, je me tricote un pull ? Comme si ça n’était pas évident … Mais il faut dire aussi que s’il n’a pas regardé le plan, il n’a aucune idée de ce qui se trouve derrière cette porte, aussi je lui pardonne son ignorance et décide de l’initier. « T’as une meilleure idée ? » Je l’interroge en pointant la porte du doigt, réitérant ma petite expérience avec le go.. euh la matraque en plastique. Pour la deuxième fois, le pauvre objet subit une décharge plus violente qu’un gamin qui met ses doigts dans la prise du sapin de Noël. Elle n’essaierait pas de nous tuer la vieille, par hasard ? « Parce que derrière cette porte mec, y’a un trésor encore plus précieux qu'une montagne de billets. » Et c’est moi qui dit ça, c’est pour vous dire. Je pose ma main sur son épaule, parce que je suis un type tactile qui aime bien appuyer ses idées avec des gestes, comme si c’était un vieux pote à moi. « Tu vois c’est là que la vieille peau planque ses lits douillets, et j’suis à peu près certain qu’à l’heure où on cause elle est allongée sur le duvet à nous attendre, les jambes écartées. » Ouais ouais Sullivan, sûrement. Je ne suis habituellement pas le genre à me plaindre de dormir sous une tente, d’ailleurs personne ne m’a entendu protester contre cette mesure, aussi chiante soit-elle. Seulement je suis le genre à chercher à entuber la vieille fée en transgressant allègrement ses règles. Et je ne cracherais pas sur quelques neurones supplémentaires pour atteindre mon but, si tant est qu’il en ait en réserve. « Alors tu peux être motivé par deux choses là-dedans : une sieste de malade sur un bon matelas, ou une partie de jambes en l’air torride avec une centenaire. Parce qu’en bon prince que je suis, je te la laisse avec plaisir. » Et je ponctue mon alléchante proposition d’un sourire engageant.

Tyger retire ses écouteurs, sinon il va se remettre à danser dans deux secondes, alors qu'il y a peut-être un truc plus intéressant à faire ici. Peu importe ce que ce gars est en train de faire, ca doit être intéressant. Peut-être qu'il essaie d'ouvrir les portes vers l'endroit où est cachée toute la bonne bouffe, ou toutes les jolies filles, ou dieu sait quoi. le fait que la porte soit protégée par un sortilège qui électrocute le bout de plastique ca montre qu'il y a vraiment un truc important derrière. Peut-être que c'est la que la vieille fée cache sa réserve de botox ? Ou les photos nus de tous les candidats ? Le gars dont il ne sait d'ailleurs toujorus pas le nom, ou que ça lui revient pas vraiment encore, lui fait l'article de ce qui se cache derrière la porte magique, comme si c'était vraiment la caverne d'Ali Baba. Genre comme s'il y avait assez de richesses qui s'y cachaient pour essayer de braver ce sortilège d'électrocution. Non Tyger a pas trop envie de se faire griller comme le pauvre go... bout de plastique. C'est vrai qu'on se demande ce que c'est ce truc, vous croyez que la vielle fée laisse ses sextoys dans le chateau ? se demande-t'il l'air un peu perplexe. Ah puis il comprend enfin, c'est juste les dortoirs dont on leur a fermé l'accès au profit des tentes dehors, c'était marqué sur la carte. Et l'autre lui fait croire que y a la Vieille Fée qui els attend aussi. Elle est pas vraiment du gout de Tyger, parce que de un elle a l'air prête à tous les tuer, et de deux, elle approche un peu de la date de péremption. Enfin, il se rappelle aussi qu'il l'a un peu draguée pendant le casting, et que c'est peut-être pour ça qu'il a été sélectionné, comme quoi sa stratégie a payé. “ Ouais non ça va je te la laisse volontiers la Vieille Fée. De toute façon je pense qu'elle nous étranglerait si on l'approchait de trop près. ” Il fait un peu genre intimidée par la Vieille Fée mais en même temps il a pas envie de mourir eh. Bon il pourrait partir, parce qu'il est que moyennement chaud à l'idée de se faire griller, mais il se dit que ça peut être drôle ou au moins intéressant de jouer le jeu de l'autre. “ Et tu comptes t'y prendre comment pour entrer sans finir comme une saucisse sur le barbecue ? Remarque, entre se faire buter par la Vieille Fée et se faire rôtir sur place, je sais pas ce qui est le pire. Bon en tout cas, t'as une idée pour pas finir comme son sextoy là ? ”

Ah voilà, l’idée se fraye un chemin dans la petite tête du tatoué qui semble passablement intéressé. Pas par la vieille peau en tout cas, –franchement je ne capte pas, elle a l’air appétissante, non ?- il me le fait clairement comprendre. Il semblerait même que le partenaire de Winnie l’ourson tremble à l’idée d’un face à face avec la mémé, quelle mauviette. « Ne me dis pas que t’as peur d’une vieille mamie. Je veux bien que certaines personnes cachent leur jeu … » Et je plonge mon regard dans le sien avec un peu trop de profondeur pour qu’il ne soit pas rempli de sous-entendus du genre ‘comme toi’. « … mais attends là, on parle d’une vieille bique qui prend son pied en torturant des petits jeunes sexy comme nous dans son château. Parce que justement, c’est bien le seul moyen pour elle d’avoir le contrôle. » Ca me paraît pourtant logique, non ? Maintenant qu’elle n’est plus assez fringante pour utiliser ses pouvoirs afin de contraindre les autres à lui obéir au doigt et à l’œil, elle a inventé toute cette mascarade pour grimper aux rideaux. Voir du sang, manipuler son petit monde, exercer son sadisme au-delà des limites de l’âge. Bref, je ris légèrement lorsque le tatoué reprend la parole. « Ah toi aussi t’as des doutes sur ce machin … » Je pointe le gode/matraque du doigt, dubitatif. « Je l’ai touché. » Ai-je le soudain besoin de me confier avec une légère grimace. « Deux fois. » Ark, c’est dégueulasse. Puis je fixe de nouveau le champ électrique pour réfléchir à la meilleure tactique afin de passer ces fichues portes. « Tu sais quoi ? Peut-être que ça empêche les objets de traverser pour nous faire flipper, mais qu’un humain retenterait sans problème. » Parce que ce n’est pas dans son intérêt de nous faire rôtir à la broche. « C’est sûrement un test de la vieille fée pour récompenser les plus courageux d’entre nous, j'veux dire on est à Gloden Valor, non ? » J’affirme avec assurance, avec une petite tape dans le dos de mon cobaye tout désigné. Je ne suis pas sûr de le convaincre de se sacrifier alors qu’il vient de me confier se pisser dans le froc à l’idée de se retrouver nez à nez avec la mémé, mais bon, qui ne tente rien n’a rien, n’est-ce pas ?

C'est pas qu'il a peur de la vieille, Tyger, mais il a pas trop envie de se mettre dans sa ligne de mire dès le début, l'important c'est de survivre. Après elle lui rappelle toutes les gouvernantes plus vieilles que Geneviève de Fontenay et à la gueule ravagée par la chirurgie esthétique faite dans un squat par un boucher qui essayaient de le mater quand il était petit. Et y a qu'à voir le résultat aujourd'hui, elles ont pas vraiment réussi. Alors la Vieille peau n'y arrivera surement pas. Elle peut bien essayer de torturer ces petits jeunes sexy comme il dit, Tyger ça lui fait pas peur. Attends il a dit "sexy comme nous" il serait pas un peu en train de la brancher avec des sous entendus comme ça ? Tyger le range donc dans la catégorie 'peut-être gay' dans sa tête. Mais bon il reste dubitatif et le laisse déblatérer son analyse psychologique de la Vieille Fée. Et un psychologue du dimanche avec ça. Tiens il va le laisser parler, comme ça il peut en apprendre plus sur lui sans se mouiller. Mais il a du mal à rester silencieux quand il parle du prétendu sextoy et éclate de rire. “ Oh allez, je crois pas qu'il ait été utilisé depuis un moment. Mais peut-être que c'est sa stratégie pour attirer à elle les jeunes hommes sexy comme nous jusqu'à elle. Y a peut-être un sortilège dessus ou je sais pas. ” Il a du mal à se retenir de rire pendant qu'il parle. “ J't'aurais bien serré la main pour me présenter, mais je crois que je vais éviter du coup, tu m'en veux pas ? Moi c'est Tyger et toi... C'est un truc comme Sulla, Soulant, euh non Sullivan j'crois ? C'est toi qui a fait l'entrée fracassante au prime non ? ” Enfin bref, les présentations finies, retour au sujet de cette fameuse porte. Sullivan a une théorie intéressante, du genre que ça n'affecterait pas les humains. Tyger y croit pas trop, même si la tirade sur la vieille fée qui voudrait récompenser le courage des candidats aurait presque pu le convaincre. “ Peut-être ouais... T'as qu'à essayer, au pire, ça annulera peut-être l'effet du sortilège du sextoy. ” Grand sourire.

Ah ça le faire rire le malheur des autres, j’en étais sûr qu’il feintait en jouant les agneaux. Un vicieux, ça m’intéresse –non, ce n’est pas ce que vous pensez.-. Je jette un œil dégoûté à l’objet inanimé, puis à mes mains comme si elles avaient été ensorcelées. Bordel, j’avais pas pensé à ça. « Parle pas de malheur ! » J’énonce en lui filant une tape sur l’épaule. Qu’il se taise bon sang, je commence à avoir des images très désagréables dans ma tête. C’est vrai qu’en l’état actuel des choses je serais prêt à faire quelques concessions sur mon partenaire sexuel, mais de là à piocher dans les maisons de retraites ou la rubrique des plus vieux débris encore vivants … Y’a des limites, restons corrects. Encore plus dérangeant que l’Exorciste. Je souris lorsqu’il refuse de me serrer la main, à sa place j’aurais fait la même chose, juste au cas où, puis lui lance le regard du mec faussement amusé par sa petite recherche des prénoms. « Sullivan ouais, déforme pas mon nom parfait s’il te plaît. Et mon entrée n’était rien d’autre qu’un avertissement généreux de ma part. » Je croise les bras sur mon torse. « Histoire de vous avertir que vous êtes venus pour rien. » Non mais sérieusement, c’était plutôt cool de ma part, non ? Certains auraient pu remballer leurs valises et s’éviter une amère déception. Enfin passons, réfléchissons plutôt au moyen d’ouvrir cette fichue porte. Apparemment le tigre n’a pas de meilleures idées que la mienne, faut dire que c’est difficile de faire mieux que moi, et me suggère même de me sacrifier pour la bonne cause. Je lâche un rire sonore à sa référence au sextoy, mais pour une probabilité infime d’inverser un sortilège d’amour lancé par la vieille peau fripée, je n’irais pas volontairement mettre les doigts dans la prise. « En fait tu vois, j’ai un léger problème cardiaque et j’ai bien peur que si je joue les cobayes, ça me tue sur place. » Mythomane, moi ? Nooooon. Mais en fait voyez-vous, je pensais qu’il se dévouerait aimablement. « Au fait, t'es pas le mec qui s'est fait emballer par sa partenaire dès le premier soir, toi ? Joli coup, en passant, elle a un de ces culs ... Par contre ta soeur avait pas l'air franchement ravi. » Comment ça je suis en train d'insinuer qu'il se passe un truc pas net entre eux ? Pas du tout voyons, vous me connaissez mal ... Et j'en oublie presque les lits confortables.

Ah berk il l'a touché lui alors qu'il est contaminé là. Une expression de dégout sur le visage, Tyger essaie de reculer. Il voudrait pas tomber amoureux de la vieille non plus, il a d'autres chats à fouetter. C'est pas non plus qu'il a peur de se faire toucher par un mec qui aurait éventuellement des vues sur lui, non non non, il lui fait pas peur, quand bien même il en voudrait à son petit cul. Et en plus il est imbu de lui-même bah allez. Tyger roule un peu des yeux, c'est surement pas le premier petit con arrogant qu'il voit, ni le dernier, et il faut avouer que lui non plus n'est pas si modeste que ça, mais il est pas impressionné. Mais finalement plutôt que de le rembarrer il trouve ça plus drôle de déconner un peu avec lui, en se foutant légèrement de sa gueule peut-être, d'accord. “ Ouais ouais, t'es une âme charitable c'est ça. Et moi je suis Mère Teresa. ” Puis genre y a un truc qui lui traverse l'esprit. “ Eh d'ailleurs tu vois pas la ressemblance entre Mère Teresa et la Vieille ? Enfin physiquement j'veux dire, parce que au niveau du caractère je pense pas. Sauf si jamais en fait quand tu touches la barrière ça te tue pas mais ça te rend heureux ou je sais pas ça te fais jouir. ” Ca le fait rire. C'est quoi ce tissu de mensonge qu'il vient d'inventer ? Il pourrait presque y croire, tant ils sont en train de faire les suppositions les plus absurdes. En tout cas, Sullivan s'est toujours pas décidé à y aller, et Tyger n'a surement pas envie de mettre sa main au feu, et puis c'était aps son idée au départ merde. Sullivan lui sort une excuse mais Tyger reste un peu sceptique. C'est la journée des mythos t'façon, vu comment lui aussi est bien parti, mais soit, nous avons là un courageux. Enfin deux. Sullivan part ensuite sur le sujet de sa partenaire et de sa soeur, et Tyger a envie de lui dire de s'occuper de ses oignons, mais ce serait surement prétexte à ce qu'il n'arrête jamais de l'emmerder avec ça. “ Ouais ben ma soeur elle fait sa vie, et moi je fais la mienne, et je compte pas me retenir avec le superbe corps d'Absinthe si tu vois ce que je veux dire. Et toi tu fais quoi de ta vie ? Déjà chopé cette semaine ? ” Grand sourire, genre allez partageons nos histoires de meufs - ou de mecs hein - parce que t'es mon bro (et accessoirement comment éviter un sujet qui fâche). Finalement Tyger, sous l'impulsion du moment, regarde la porte et se dit que ça lui emboucherait surement un coin à ce Sullivan si il bravait le danger et touchait la porte. “ Bon allez moi j'suis pas une mauviette, j'y vais. ” Puis lui il a pas de problème de coeur, il en a pas, qu'il aurait pu rajouter. Il fait un grand sourire à Sullivan, genre celui du méchant dans un film de super-héros avant qu'il appuie sur le bouton pour lancer une bombe nucléaire dans ta vie, et avance lentement sa main vers la poignée de la porte.

Non, sérieusement ? Aurais-je finalement réussi –après tant d’efforts infructueux et d’insultes non méritées- à trouver le seul type du château avec un minimum de sens de l’humour ? Merci mon Dieu il ne fait pas partie de ces innombrables coincés du cul … Non parce que c’est bien le premier à ne pas me toiser d’un œil réprobateur quand je lui balance ma perfection sous le nez, et j’entrevois la possibilité d’une conversation certes un peu stupide, mais qui détend. Pas un truc angoissant où tu t’attends à te recevoir une tarte dans la gueule à tout instant. J’veux bien qu’on ne soit pas là pour se faire des potes, mais ça ne sous-entend pas qu’on soit obligé de passer notre aventure à se cracher dessus. Bref, finalement il peut bien aimer sa mère, ça ne me dérange pas plus que ça. Je hausse un sourcil lorsqu’il affirme ne pas me croire, écoutant sa charmante théorie en me mordant la lèvre. Ce type est complètement barge, dans le genre suppositions fumeuses je crois qu’il vient de gagner la palme d’or. Je me bidonne à mon tour devant la porte électrifiée, imaginant la vieille peau dans un habit de nonne. J’ai toujours été persuadé que Mère Teresa était un mec sous sa jupe, aussi je trouve que c’est particulièrement vexant pour la vieille, cette comparaison. En plus ça lui irait particulièrement mal à cette sadique, elle se réjouit bien trop du malheur des autres pour que ce soit crédible. Enfin il n’arrivera pas à me convaincre avec ses idées –aussi brillantes soient-elles-, je préfère encore utiliser ma main droite pour autre chose que m’électrocuter, en étant sûr du résultat. Et puis lui non plus n’a pas l’air de faire confiance à ses conclusions, puisqu’il reste en retrait en me signalant par la même occasion qu’il est aussi courageux que moi. Mais sa tête me revient subitement comme une envie de pisser, et j’ai les images du prime qui remontent à la surface. Ouais, y’avait cette fée bien balancée qui l’a salué en lui roulant une pelle –si si, j’vous jure-, comme si de rien n’était. J’veux bien aller lui dire bonjour moi, si y’a que ça. J’essaie alors de le titiller avec un sujet sensible, mais il ne mord pas à l’hameçon aussi facilement. Tant mieux, le contraire aurait été emmerdant. Il a beau prendre un air désinvolte, je sens bien à son hésitation que j’ai touché une corde sensible. Je l’écoute toutefois avec attention, soupirant avec l’air du mec désespéré. « M’en parle pas, tout ce qui est chopable ici est particulièrement dangereux. C’est comme mettre un gâteau bourré d’arsenic sous le nez d’un petit africain. » Ouais, déjà que les choix sont limités ... M’enfin, de toute manière ce n’est pas ma préoccupation principale dans ce château, j’suis pas là pour me dénicher quelqu’un à plaquer contre le mur. Bien sûr ça pourrait être une petite récompense, une stratégie même, mais je ne vais pas pleurer si l’occasion ne se présente pas. Et le mec s'approche de la poignée, genre j'suis superman, limite en gonflant le torse. « Tu dois sacrément avoir la dalle. » Peut-être que sa partenaire n'est pas si performante que ça ... J'hésite presque à pousser son épaule dans un signe d'encouragement, le forçant à aller jusqu'au bout, mais si cette idée était bien présente dans mon esprit quelques minutes plus tôt, je juge à cet instant présent que ce n'est pas le meilleur mouvement sur l'échiquier. En plus, il risquerait de servir de conducteur et c'est moi qui prendrait la décharge en pleine face. « Vas-y laisse tomber, ça vaut pas dix secondes de plaisir. » Et j'attrape son épaule pour le tirer vers l'arrière, non déçu de briser ses rêves de grands méchants. Puis je tourne les talons en soupirant, renonçant non sans regrets à la perspective de m'étaler sur un bon matelas.