BO et TYGER

Trop de monde dans cette chambre, trop de bleu partout, trop de gens qui ronflent, putain c'est quoi ce truc. Avec sa partenaire qui essaie de l'étouffer dans son sommeil avec ses seins, Tyger se demande vraiment ce qu'il fout là certaines nuits. Non sérieux, c'était mieux quand il dormait juste avec Vixy dans leur appart à se glisser l'un dans le lit de l'autre quand il faisait froid où qu'ils avaient juste fait un cauchemar, ou juste parce qu'ils se sentaient un peu seuls. Mais là ici, dans ce foutu chateau de merde, Vixy est loin de lui, au lit avec une fée, dans une chambre où elle a l'air de bien s'éclater, alors que Tyger se demande encore ce qui est passé dans la tête d'Absinthe pour composer ce groupe-là. Non c'est pas qu'il les détestent, mais ils sont pas Vixy quoi. Alors quand il fait un cauchemar, c'est pas pareil. Il s'est endormi ce soir là en fixant les murs qui représentent une plage avec des palmiers, et s'est retrouvé dans un rêve sur cette même plage de cocotiers; Sauf que au lieu de porter des noix de cocos, les palmiers avaient des immenses bestioles avec des mâchoires affreuses qui voulaient le dévorer alors il est allé se jeter dans l'eau pour leur échapper, mais dedans y avait des algues fluo qui essayaient de l'empêcher de remonter à la surface. Il s'est débattu pendant des heures alors qu'il étouffait jusqu'à réussir à se réveiller et se rendre compte que tout ça n'était qu'un rêve. Le souffle court, il attend en fixant le plafond lui aussi bleu comme cette mer où il a failli se noyer. Et puis il a besoin d'aller se rafraichir, alors il se lève un peu brutalement, mais en essayant de ne réveiller personne, et fonce à la salle de bains se passer de l'eau sur le visage. Quand il fait couler l'eau dans le lavabo, il se dit qu'il est con, parce que l'eau justement, c'est ce qui vient de le faire flipper. Si seulement il avait une Vixy sous la main pour lui enlever toutes les algues qui risquent de l'atrapper. Et si des algues sortaient des tuyaux comme le basilic ? Il se fait un gros flip et arrête l'eau du robinet. Il croit entendre derrière lui, et chuchote d'une voix un peu irritée. “ Il s'passe rien, retourne dormir ! ”

Je crois que j'ai toujours apprécié les cauchemars. Ils sont sources de tout ce qui peut clocher dans un être humain, que ce soit ses plus grandes peurs, ses plus grands soucis. Je ne me suis jamais dit que je devais les craindre, parce que mauvais rêves comme bons, ils ne sont qu'une partie de ce que l'on aimerait être, ce que l'on aspire à devenir, comme ce que l'on a été. Ils sont nous, déformés, amplifiés ou non. Tordus. Mais personne ne pourrait enlever le fait que chaque être humain a besoin de réconfort. Je entendu sursauter au loin, je l'ai vu quitter la pièce, une moue effrayée, désarçonnée sur son visage. Je l'ai vu. Et j'ai hésité. Quel genre d'homme cela faisait de moi ? Etais-je celui qui laissait un ennemi dans le pétrin, parce que oui, nous étions tous en quelques sortes en compétition... Ou étais-je de ceux qui tentaient de résoudre des problèmes par a+b-c=z. Je ne cherchais pas la logique puisque je savais que ma définition de logique n'était pas celle que l'on pouvait lire dans les bouquins. Pourtant je me savais rassurant. Un peu. Juste un peu. Parce que je n'aurais pas la prétention de croire que je pourrais sauver quelqu'un de ses propres cauchemars. Il devait le faire par lui même. Alors je m'étais levé, vêtu d'un simple boxer, tenue de nuit que la plupart des hommes abordaient, suivant Tyger jusqu'au lavabo près duquel il se trouve. Sans un regard, il prend alors la parole « Il s'passe rien, retourne dormir ! » pourtant, je fais un pas vers lui. « Je ne suis pas là pour te juger Tyger. » murmurais-je d'une voix pleine de douceur et de compréhension « Et... si tu as envie d'en parler... ou de ne pas en parler, je peux juste rester là, à te soutenir. Peut-être qu'une autre présence te rassurera un peu, même si je n'ai pas la prétention de dire que je suis la réponse à tous tes problèmes. » je marque un blanc, hésitant, avant de reprendre « Je peux au moins tenter de les assoupir. » j'adresse un nouveau pas vers le jeune homme, alors qu'un léger sourire, doux, délicat, s'esquisse sur mes lèvres.

Quand il fait un cauchemar, Tyger a l'impression de redevenir un petit gamin, celui qui faisait pipi au lit ou qui se réveillait en pleine nuit au milieu du dortoir pour découvrir que les autres petits cons avaient mis du yaourt dans ses draps. Alors quand ca lui arrive à Golden Valor, là où il est sensé être trop fort, trop parfait, terrasser ses ennemis et défoncer tout le monde sur son passage, çale fait pas trop. Il espère que ces images finiront pas dans la quotidienne. Si quelqu'un le voyait ce serait vraiment la honte, même s'il aurait bien besoin de réconfort. Trop tard, quelqu'un l'a déjà grillé. Il n'ose même pas se retourner pour voir qui c'est. Il croit reconnaitre la voix de quelqu'un de sa chambre, Bo, peut-être. Oui ça doit être Bo, qui a la voix bien plus posée que celle de Sullivan. Il lui dit des mots gentils, des mots apaisants, comme dirait une maman, ou comme dirait Vixy. C'est juste quelqu'un qui veut l'aider. Quelqu'un d'aussi gentil dans l'aventure, Tyger ne pensait pas que ça existerait. Et là, en pleine nuit, il a pas vraiment son alarme qui lui dit 'méfie-toi'. Alors il se laisse amadoué par cette jolie voix et fini par se retourner pour faire face à Bo. Il a le teint livide. Il a juste une seule envie en fait... Il s'avance vers Bo, lentement, hésitant, et le prend dans ses bras. Puis il se rend compte de ce qu'il vient de faire, et que c'est peut-être pas ce qu'il attendait pour la première fois qu'ils discutent vraiment. Il lui tapote l'épaule pour faire genre non, ce n'est pas une étreinte si intime que ça en a l'air. Il a juste deux secondes, cru que c'était Vixy, même si il y ressemble pas du tout, il lui manque un peu de cheveux blonds. “ Merci, mec. ” murmure-t'il. Puis il se dit que c'est un peu génant en fait ce câlin alors il se retire un peu brusquement, affichant un air embarrassé. “ Désolé. Je suis un peu dérouté je crois... Je viens de faire un cauchemar, c'est tout. ” Et voila comment redevenir un gamin de 5 ans. Il repense à son cauchemar, aux noix de cocos mangeuses d'homme, à l'océan, aux algues et à cet impression qu'il a eu d'étouffer. “ Je vais pas t'embêter avec mes cauchemars de gamin hein. J'ai pas de problèmes, non, je fais juste des cauchemars comme tout le monde. Mais après si ça t'intéresse hein... Je sais pas, si t'es psy ! ” Il a un petit rire, et espère que personne ne les entend dans la chambre.

Oui, les cauchemars n'étaient que le reflet de nos propres pensées, de nos propres êtres. Il suffisait de les accepter. Il suffisait de laisser ces quelques murmures intérieurs nous guider. Il suffisait de les embrasser, de les défier d'un regard afin de mieux les dompter. Evidement, c'était bien plus simple à dire qu'à faire, puisque ceux ci retraçaient parfois nos plus grandes peurs. Il n'y avait rien de plus terrifiant que de faire face à ses cauchemars. Alors, le jeune homme se retourna un instant avant de finalement s'approcher de moi. Là dessus, il ne tarda pas à me prendre dans ses bras, chose qui aurait pu en surprendre plus d'un mais que je trouvais tout à fait naturelle. Je n'avais jamais été effrayé par des contacts physiques. Si les humains n'avaient plus le droit de se toucher, ou semblaient effrayer à l'idée d'effleurer la peau de leur semblable, jamais l'espèce n'aurait pu continuer à exister. Alors oui, cela me semblait être une des choses les plus naturelles au monde. Et de toute façon, tout le monde cherchait dans le regard de son coéquipier, un moyen de rassurer ses craintes. C'est en partie à ça que servait le partage. « Merci, mec. » finalement, comme gêné, il me tapote un instant sur l'épaule avant de se reculer un peu maladroitement. « Désolé. Je suis un peu dérouté je crois... Je viens de faire un cauchemar, c'est tout. Je vais pas t'embêter avec mes cauchemars de gamin hein. J'ai pas de problèmes, non, je fais juste des cauchemars comme tout le monde. Mais après si ça t'intéresse hein... Je sais pas, si t'es psy ! » un léger sourire se retrace sur mes lèvres alors que je passe un instant une main sur mon épaule, chassant une éphémère démangeaison. « Tu n'as pas à être désolé, de ça comme de cette étreinte. Si je t'ai apporté ne serait-ce qu'un minimum de réconfort, tu m'en vois ravi. » mon sourire s'étire un peu plus, sincère, avant de finalement se faner, mes yeux scrutant les siens sans crainte de l'intimider. De le gêner. « Disons qu'ils ne m'intéressent que si tu ressens le besoin de me les confier, ou d'en parler. » je le contourne un instant pour fixer mon reflet dans le miroir, une seconde, deux secondes, avant de reprendre la parole « Tu sais... je ne suis pas de ceux qui font attention à l'image qu'ils renvoient. Et je ne juge clairement pas quelqu'un pour ce qu'il est. Tu es comme tu es, tes cauchemars sont une partie de toi, alors clairement, non, je ne me permettrai pas de me moquer de toi si tu venais à m'en parler. » je refais une nouvelle fois face au jeune homme, déposant une main sur son épaule, une seconde, deux seconde, avant de finalement la tapoter, imitant son geste un peu plus tôt, lui montrant que j'avais bien saisi qu'un contact physique du genre avait tendance à le mettre mal à l'aise. Mon sourire s'esquissa à nouveau, doux, léger comme une brise.

Ce qu'il se sent con Tyger. Déjà il fait nuit, il s'est réveillé de travers, il a pas les idées en face et il est supposé mener une conversation à peu près sensée. En plus il vient de faire un cauchemar, alors il a encore les sens complètement flippés, il a des frissons, il est encore sur les nerfs. Il est pas encore sûr de s'être réveillé en fait. Et puis y a ce gars qui a débarqué, alors qu'il est déjà pas trop dans son assiette, alors il se sent dans une position de faiblesse, et il aime pas ça. Puis il vient de lui faire un calin, alors que euh, ca se fait pas trop quand on rencontre à peine les gens, non ? Bon, tout ça pour dire qu'il a pas les yeux en face des trous. Alors il sait pas trop ce qu'il fait mais il l'écoute parler ce Bo, qui a les mots si doux et si gentils qu'il a encore envie de lui faire un câlin comme s'il était redevenu un petit garçon. Ce gars-là le rassure, il se sent en confiance, bizarrement. “ T'as l'air d'être le mec parfait. Sérieux, comment tu fais ? Apprends moi, j'en ai marre d'être un connard des fois. “ Il sourit, oups, il a peut-être pas encore montré à tout le monde à quel point il pouvait être un connard, en espérant que ça le trahisse pas. Puis il se décide enfin à arrêter de tourner autour du pot. L'autre va pas le lâcher si il lui raconte pas son rêve on dirait. Mais bon c'est quand même assez personnel cette histoire, c'est un peu comme s'il se mettait tout nu devant lui. “ Bon allez, je vais te raconter. J'te jure on dirait que j'ai fumé. Alors j'étais sur une plage tranquille, mais sur les palmiers, au lieu de noix de coco, y avait des machoires qui voulaient me bouffer, alors je suis allé dans l'eau, et comme les algues m'ont attrapé, j'étais en train de me noyer... ” Il regrette déjà d'avoir commencé à raconter ça. Tyger n'est pas du tout du genre à parler de ses sentiments. Alors il fait genre il prend ça à la rigolade, alors qu'au fond les mâchoires, l'eau et les algues, ça le fait flipper là. “ Qu'en dites-vous Docteur Bo alors, est-ce que je dois aller à l'asile ? ”