Je jette un coup d’œil à Lilou. C’est bon, elle n’est pas toute seule. Je la préviens d’un regard que je pars. Je ne veux pas qu’elle s’inquiète. Je ne sais pas du tout si elle aime être ici, si elle aurait pas plutôt préféré rester tranquillement à l’appart, à l’abri des regards, des jugements. Enfin, pour l’instant personne n’a vu son pouvoir agir, personne ne sait rien, j’espère que personne n’en saura rien, jamais. Je me demande quelle serait la réaction des autres, s’ils savaient que je l’aidais. C’est étrange comme relation, pas anodin du tout. J’ai peur pour dire vrai, peur que ça la blesse. La culpabilité que j’avais ressentie lors du prime refait surface. C’est moi qui l’ai fait venir ici, on a toujours tout fait ensemble, alors si je voulais faire cette émission il fallait qu’elle me suive. Pour l’autre raison aussi. Je soupire en me frottant nerveusement les tempes. Le bateau me donne un de ces mal de tête à force. Je m’éclipse donc en direction de la salle de repos. Ils ont pas de dolipranes ou de trucs dans le genre dans le coin ? Une fois dans la pièce je remarque une candidate blonde. « Salut, moi c’est Lisa. » que je lui dis automatiquement. C’est devenu un reflex maintenant, dès que je rencontre une personne, je sors cette phrase. Bon, il faut que je trouve ces foutus médicaments. « On doit taper des mains pour avoir ce qu’on veut, c’est ça ? » que je demande à la jolie blonde, encore peu habituée au monde magique. C’est sensé marcher pour la nourriture, ça devrait fonctionner aussi pour une boîte de comprimés. Je tape mes mains énergiquement tout en me concentrant sur l’objet de mes désirs. Pof. Un plat apparaît. Une sorte de gelée marron bizarre qui ondule au rythme des vagues. Je fronce du nez. Eurk. « C’est quoi ça ? Ils ne connaissent pas les dolipranes on dirait. » que je m’indigne. Hors de question que je mange un truc pareil.

Je suis assise à l’ombre lorsqu’une brune arrive dans la pièce, je la salue vaguement d’un geste de la main, elle s’identifie assez rapidement. Je vais essayer de retenir, oui. Lisa. Ce n’est pas elle qui est venue Lilou ? Une blonde, non ? Ou je suis à côté de la plaque, ce qui ne m’étonnerait pas non plus à vrai dire. « J’suis Raisa. » Je me présente à mon tour en la fixant un moment, deux ou trois secondes. « Aucune idée, j’imagine oui. » Je lui dis en haussant les épaules. Elle finit par essayer sa théorie. Trop stylééé ! Du coup, je fais pareil, je frappe des mains et une paille apparaît. J’adore, j’adopte. Je me concentre sur le plat de la petite brune. Ça ne m’inspire pas du tout. Je laisse transparaître une moue de dégoût sur mon visage. Ce n’est même pas étrange dans le style intéressant, non c’est juste dégueulasse tout court quoi. « T’es sûre que tu veux pas goûter ? » Je lui dis en tendant un doigt froid vers la chose à la couleur étrange, je la tapote et elle tremble, tout se répercutant. La texture est étrange, je n’aime pas cela. Pas du tout. Tout compte fait, ne mange pas ça, vraiment. « Ça peut être une espèce de nouvelle cuisine moléculaire avec genre doliprane intégré. » Je suppose alors en haussant les épaules. Tout est possible non. Elle devait penser à du doliprane quand elle a frappé dans ses mains, je ne vois pas pourquoi cette chose sortirait à la place sans raison.