Le prime avait apporté une dose incroyable d’adrénaline mais aussi, paradoxalement, une fatigue intense et le cocktail de ces deux états physiques n’était pas très facile à supporter. Recroquevillée dans son lit de camps minuscule, Eukleia avait pris un temps incroyable à s’endormir, elle avait tourné, retourné, encore tourné, gênée par les respirations des autres filles qui l’entouraient. Elle avait senti sa patience la quitter puis, enfin, elle avait trouvé le sommeil. Pourtant, elle ne pourrait en profiter longtemps. Une heure plus tard, alors qu’elle était plongée dans un rêve des plus éprouvants, elle entrapercevait une allure masculine – qui n’avait, à vrai dire, rien à faire là – faire son apparition. « euk ! » disait la silhouette noirâtre qui se dessinait. « Leia ! » Soudain, la silhouette venait la secouer. Elle gémit et fit volteface. « EUKLEIA » entendit-elle alors résonner dans sa tête. Elle ouvrit brusquement les yeux, sur la défensive. Elle laissa le temps à ses pupilles pour s’acclimater à la pénombre troublée par la luminosité de la lune pour enfin comprendre que se trouvait devant elle… Serafin. Elle fit une grimace. C’était quoi son problème ? « Tu viens ? Faut qu'on cause cassage de dents, toi et moi » Elle aurait voulu l’envoyer bouler bien comme il faut – bien comme il le méritait en fait – mais elle trouvait tellement adorable le fait qu’il veuille s’impliquer qu’elle n’avait pas le cœur à le jeter. Pourtant, Dieu sait qu’elle en avait envie. Sans un mot, elle repoussa ses couvertures, s’étira quelques secondes et le suivit dehors. La nuit était fraiche et la brise venait caresser ses épaules. Elle frissonnait et maudissait Serafin de l’avoir réveillé : car à en juger par le noir de la nuit et le calme au dehors, l’heure ne devait pas être très avancée. « Nom d'un caca de fée, j'espère qu'on devra pas affronter quelqu'un qui endort les gens, ou alors, faut que je trouve une technique pour te réveiller instantanément » Elle secoua la tête. « Généralement, les combats ne devraient pas se dérouler à 2h du matin, Serafin… Je crois qu'il ne devrait pas y avoir de problème. » Puis, elle le voyait enchaîner. Un vrai moulin à parole ce gars-là, elle n’était pas sûre de pouvoir le supporter bien longtemps. « Au fait, tu préfères "Euk" ou "Leia" ? Eukleia, c'est trop long. » Elle secoua un peu plus la tête, prenant cet air désespéré qui lui était coutumier. « Chéri, tu m’as pas réveillé pour discuter de mon surnom quand même ? Et abstient toi de petits noms, va. C’est ridicule. Je t'ai proposé de t’appeler "Ser" ou "Afin" ? Pas à ma connaissance. » Sourire crispé. Elle n’était pas capable de mieux. Elle oubliait même que les caméras étaient peut être braquées sur eux, même en pleine nuit, et s’autorisait un bâillement à s’en décrocher la mâchoire. Elle se demandait déjà pourquoi elle avait accepté de suivre son coéquipier. Dès le lendemain, il faudra qu’elle pose des règles. Cela semblait nécessaire avec ce garçon-là. « Je me suis renseigné. » disait-il. « Oh tu t’es renseigné ? Youpi. Donc, tu es censé savoir que cela fait à peine 4h qu’on est dans l’aventure ? Ca ne pouvait pas attendre demain ?... » Elle bailla à nouveau. Elle n’avait pas forcément le désir d’être désagréable mais de nature franche elle n’avait pu s’empêcher de prononcer cette remarque. « Et quelles sont vos conclusions, Sherlock ? » demanda-t-elle. Ils marchaient toujours, et elle ne savait même pas où ils allaient. Elle regarda alentour pour trouver un endroit pour s’assoir.

Allez reprend tes esprits, chérie. Il fallait réellement qu’Eukleia commence à se calmer si elle ne voulait pas se mettre son coéquipier à dos. Certes, elle se fichait bien de ce qu’il pouvait penser d’elle mais il était certain qu’une mauvaise ambiance dans un duo n’était pas la meilleure façon pour que ledit duo réussisse quelques prouesses. Or, ces prouesses la sorcière les voulait. Et dès le premier duel. C’est pourquoi elle commença à calmer son énervement crée par le réveil nocturne et tenta de prêter attention au jeune Fé, même si elle n’en avait pas forcément envie. Elle ne releva pas la remarque sur Sherlock, elle n’avait pas la force d’expliquer les histoires humaines à son binôme et, comme ils n’allaient pas se battre à coup de loupe et d’ « élémentaire mon cher Watson », cette parenthèse semblait inutile. Déjà, à côté d’elle, Serafin se mit à l’aise et Eukleia l’observa avec un petit sourire en coin. Ce gars-là était tout un poème à lui seul. Espérons que ses capacités comiques innées – et surement involontaires – ne soit pas son seul don. A moins que les candidats de Golden Valor aient une profonde aversion pour le rire… Elle secoua sa petite tête et se força à l’écouter. « Alors, c'est quoi ton truc ? T'as un pouvoir trop classe ou tu peux me changer un crapaud en claquant des doigts ? Moins glamour mais sans nul doute efficace, cela dit... » C’était drôle comme question. Comme ça, il n’avait pas encore pigé qu’elle était une sorcière. « Mes pouvoir vont bien plus loin qu’une métamorphose en crapaud. » répondit-elle avec un sourire. « Je suis une sorcière, et j’ai donc de nombreux sorts et enchantements à ma disposition. Et, je vais te dire le fond de ma pensée, j’ai sûrement bien plus de sorts à mon actif que les autres sorciers présents sur ce terrain de jeu. Je me suis bien entraînée avant de venir ici. Tu es tombé sur la bonne coéquipière, ça tu peux en être sûr ! » Un peu prétentieuse ? Oh… Oui, un peu. Mais elle était presque certaine que Serafin ne lui en tiendrait pas rigueur. Si elle se fichait de ce qu’il pensait d’elle, elle voulait aussi le mettre à l’aise en lui faisant comprendre qu’il n’avait pas à douter de ses propres capacités. Les résultats sont toujours meilleurs quand on a la confiance de notre côté. « Et toi tu es un Fé, n’est-ce pas ? Drôle de race hein. Vous savez faire quoi au juste ? » demanda-t-elle à son tour.

Comme un gosse impatient de montrer le beau dessin qu’il venait de faire, Serafin voulait apparemment faire ses preuves. A croire qu’il avait besoin d’impressionner Eukleia, mais aussi qu’il avait grand besoin qu’on lui dise que ce qu’il faisait, en tant que Fé, était génial. La sorcière sourit devant le sort cruel que subit l’innocente plante devant Serafin. Il n’allait pas être inutile, le p’tit. Elle trouvait même que la puissance de ses sorts n’était pas négligeable, c’était déjà ça. « Pas mal, pas mal. » dit-elle, en un sourire. « Même pas mal du tout ! » ajouta-t-elle histoire de donner encore plus confiance en lui à son partenaire. Après tout, avec quelques gouttes de confiance et des sortilèges puissants on pouvait faire des merveilles ! Il semblait qu’une démonstration de ses propres pouvoirs s’imposait à elle également. Elle se concentra sur une énorme pierre qui se trouvait sur le côté et prononça un sort capable d’animer l’inanimé. Déjà, le gros cailloux sautillait sur place et courrait un peu partout autour d’eux. Alors que Serafin semblait intéressé par cette animation Eukleia s’exerça à quelque chose pour laquelle elle s’était entraînée au cours des quelques mois précédent l’aventure : un sortilège informulé. Elle se concentra sur ce qu’elle voulait faire de cette pauvre pierre et déjà la voilà qui explosait en des milliers de morceaux. Elle sourit : ses entraînements n’avaient pas été vains ! « Alors… Je suis géniale aussi, non ? » lança-t-elle à Serafin. Ils allaient faire une bonne équipe, elle le sentait.